1.6 - Les luxations de l'épaule
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(Remerciements à G. Walch pour ses documents et à H Coudane) Il s'agit d'une perte de contact entre la tête humérale et la glène de l'omoplate. La luxation se fait le plus souvent en avant et rarement en arrière. Exceptionnellement, elle survient en bas et le bras est bloqué en abduction : c'est la luxation erecta.
1.6.1 Luxation antérieure de l'épaule
- Mécanisme : le plus souvent, il s'agit d'une chute sur la main avec rotation externe du bras.
- La
luxation antérieure est rare chez l'enfant qui se fracture plutôt
l'humérus, elle est plus fréquente chez l'adulte jeune et le vieillard.
- Les lésions : la tête tourne en dehors et sort de la glène, elle vient se loger en avant de l'omoplate.
Ce déplacement implique des lésions capsulo-ligamentaires importantes. La capsule se déchire à son insertion sur le bord de la glène et lèse le bourrelet glénoïdien. La capsule peut aussi se décoller en arrachant le périoste
en avant de l'omoplate et garde ainsi une continuité capsulo-périostée
qui permettra une meilleure cicatrisation après la réduction de la
luxation.
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Soit la capsule se déchire au niveau du bourrelet, soit elle se décolle de l'omoplate avec le périoste et le sous scapulaire |
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Les vaisseaux axillaires peuvent être comprimés de même que les éléments du plexus brachial, ce qui nécessite une réduction d'urgence. Ils ont pu également être étirés pendant le traumatisme. La lésion du nerf circonflexe est la plus classique avec une anesthésie cutanée du moignon de l'épaule et une paralysie du deltoïde (dont le diagnostic n'est possible que secondairement).
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Lors d'une luxation antérieure, des lésions des vaisseaux axillaires et du plexus brachial sont possibles (circonflexe ++) |
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Il peut y avoir des lésions de la coiffe des rotateurs
de l'épaule avec des ruptures des différents tendons. La lésion la plus
fréquente est une rupture du sus-épineux ou une fracture du trochiter. Examen d'une luxation antérieure de l'épaule Le blessé se présente dans l'attitude classique des traumatisés du membre supérieur (tenant son bras avec l'autre main). - L'épaule est douloureuse aux tentatives de mobilisation.
- La
déformation peut être évidente avec la saillie de la tête humérale en
avant et la saillie externe de l'acromion en dehors : signe de
l'épaulette. Le bras est en abduction et en rotation externe.
- La palpation recherche :
- la saillie de l'acromion,
- la vacuité de la glène,
- la saillie de la tête humérale
en avant. On peut mobiliser doucement le bras pour mieux sentir la tête
et sa position (impossible à confondre avec 1 luxation post).
- Rechercher systématiquement le pouls radial (compression de l'artère axillaire par la tête).
- Penser à rechercher des troubles de la sensibilité du nerf circonflexe et du nerf radial
La radiographie De face :
elle montre la tête en dedans et l'importance du déplacement. En effet,
la tête peut être devant la glène, sous la coracoïde, ou encore plus en
dedans.
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Luxation sous la glène, sous la coracoïde ou plus interne |
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De profil : l'incidence
classique est impossible lorsque l'épaule est luxée, car la mise en
abduction est très douloureuse. L'incidence de profil trans-thoracique
est facile à réaliser mais elle difficile à interpréter en raison de
nombreuses superpositions. L'incidence de Bloom et Obata est possible
même quand le bras est solidarisé au thorax et elle convient bien à ces
situations propres aux luxations antérieures et surtout postérieures. La radiographie permet surtout de rechercher les fractures associées : fracture du trochiter, fracture du rebord de la glène, encoche de la tête et parfois fracture du col huméral. Ces lésions sont à rechercher sur les clichés faits avant et après réduction
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Fracture du trochiter |
Fracture de la glène |
Encoche dans la tête sur le rebord de la glène |
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La radio de profil est possible, même lorsque le coude est contre le corps |
Sinon, on fait un scanner pour voir l'encoche de la tête ou la fracture de la glène |
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Traitement de la luxation antérieure La réduction de la luxation doit être entreprise d'urgence. 2 méthodes sont possibles : - La méthode progressive : elle peut être tentée sans anesthésie générale (après simple administration de calmants) et pourra réussir si elle est tentée précocement.
- Commencer par tirer sur le coude, le bras étant collé au corps (1)
- Tourner doucement en dehors jusqu'à 90° (2). La réduction se fait avec un déclic, sinon
- Mettre en adduction, le coude passe en avant du thorax (3) puis,
- Mettre en rotation interne (4).
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Méthode de réduction douce sans anesthésie |
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- La réduction sous anesthésie générale. En cas d'échec de la méthode, on doit réduire sous A G. Il
suffit de tirer en légère abduction avec une contre-extension sur le
thorax fournie par un aide ou en faisant soi-même cette
contre-extension avec son talon mis dans le creux axillaire
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Manoeuvre de réduction « plus brutale » sous AG. Faire toujours une radio après réduction |
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- L'immobilisation se fait en position de
rotation interne - coude au corps - avec une écharpe qui soutient le
bras et un bandage de VELPEAU qui maintient le bras et l'avant-bras. La
durée est de 15 jours à 3 semaines (Il faut « capitonner » le
creux axillaire).
La radiographie de contrôle après réduction doit être faite après la confection du bandage. L'évolution est le plus souvent simple avec une rééducation banale de l'épaule
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Confection d'un bandage de Velpeau |
Fracture du trochiter visible après réduction |
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Complications : - La réduction peut être instable en cas de fracture de la glène de l'omoplate. Il faut alors fixer le fragment chirurgicalement.
- Parfois, en cas de fracture associée du trochiter, le tendon du long biceps peut s'interposer
(il n'est plus maintenu dans la coulisse bicipitale) et il s'oppose à
la réduction de la tête, en empêchant aussi la réduction du trochiter.
Une intervention chirurgicale est nécessaire.
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Complication rare : l'interposition du biceps |
En cas de fracture du trochiter, immobiliser en rotation neutre |
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En cas de fracture du trochiter, il faut
éviter le bandage en rotation interne et mettre le bras en rotation
neutre, main en avant avec un petit coussin, afin que le fragment
osseux réintègre sa place (« Velpeau-polochon » ou plâtre).
On peut aussi mettre le bras en légère abduction si la radio montre une
meilleure réduction du trochiter (plâtre ou appareil réglable). Si le trochiter n'est pas réductible, on le fixe chirurgicalement avec une vis (voir chapitre suivant)
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